C'est quoi un micro single coil ?

Tous les micros Fender vintage sont des single coil (simple bobinage). Gibson, pour sa part, a commencé à utiliser des micros  doubles bobinages (humbuckers) en 1957. Les single coil, dont le bobinage est enroulé autour de cylindres magnétisés, sont facilement influencés par les bruits extérieurs. Cela inclut les hum et les lumières fluorescentes.

C'est quoi un humbucker ?

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Ce type de micro est composé de deux single coils réunis en une seule unité. Chaque single coil est bobiné à l'inverse de l'autre. Ainsi, le hum sortant du premier single coil est annulé par le hum,  du second. les deux single coils sont connectés en série. Leurs résistances respectives s'additionnent, produisant un son plus chaud sans parasites, donc plus propre. Si les deux single coils avaient été  connectés en parallèle, leur résistance totale aurait été divisée par deux. Mais, dans les deux cas (parallèle ou série), le hum est supprimé, d'où le nom donné à ce type de micro : humbucker.

Ce détour permet de comprendre pourquoi les deux positions intermédiaires des Stratocaster entraînent, quand on les enclenche, une baisse de volume. Car les micros sont connectés en parallèle. Chez Gibson, de la même manière, la position intermédiaire est mois puissante que la position neck (micro manche) ou que la position bridge (micro aigu) : Car, là aussi, les deux micros humbucker  sont branchés en parallèle.

Mesure de la résistance d'un micro

Plus il y a de spires, plus la résistance du micro est grande. Et plus la résistance est grande, plus le micro délivre un son puissant et chaud, avec un surcroît de médium. Mais la chaleur a un prix : une perte en fréquences aigues. C'est pourquoi les single coil ont moins de puissance de sortie et plus d'aigus que les humbuckers.

=> A ce titre, Schecter, en fait Tom Anderson, a inventé. Car la boîte a mis sur le marché des micros simples, qui pouvaient délivrer un son type strat ou un son beaucoup plus gras et proche des humbuckers, grâce à sa série F500T, dont voici la publicité qui en était faite à l'époque dans les années 70/80 :

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La polarité magnétique

C'est la polarité magnétique relevée sur le haut du micro. Tous les plots aimantés (magnets en anglais) ont deux pôles : le nord et le sud. Inverser le pôle d'un micro inverse également sa phase. Notez que les micros vintage Fender ont des plots en alnico (un alliage d'aluminium, de cobalt et de nickel, parfois avec du cuivre et/ou du titanium).Ils sont également dits sand cast, ce qui signifie si j'ai bien compris qu'ils sont fabriqués dans des moules de sable, la finesse du moulage ayant apparemment une influence.

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Habituellement, les plots sont chamfrénés (photo ci-dessus) sur le méplat supérieur, destinés à aider le passage des plots dans les trous de la plaque en fibre vulcanisée noire (c'est très vrai sur les strat). les plots des micros antérieurs à 1965 ont un diamètre allant de 0.185 à 0.197. Ils sont rentrés en force dans les trous de la plaque supérieure (flatwork en anglais) en fibre. Les micros fabriqués après 65 ont un diamètre plus étroit, ce qui fait qu'avec le temps la plaque en fibre qui les maintient sur le dessus s'incurve légèrement. Par la suite, Fender réutilisera des magnets plus larges, notamment sous l'ère Dan Smith (1981-1983 environ), celui qui relancera une production de qualité chez Fender, en reproduisant notamment les strat des anénes 50 et 60. Il créera également Fender Japan. 

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Les flatwork

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Ce sont les deux plaques en fibre vulcanisée encadrant les spires du micro. Celles qui tiennent et sont tenues par les plots magnétiques, dont la plus large : l'embase. Avant mars 1964, ces plaques sont de couleur noire. Par la suite, elles sont grises, avant de revenir au noir au début des années 70, a priori en 1971.

Bobinage à la main

Le bobinage des micros à la main est aussi connu sous le nom anglais de scatter winding, ou scatter wound, consistant à enrouler le fil de bobine de manière aléatoire, donnant des spires entrecroisées, ou en tout cas qui ne s'alignent pas parfaitement. C'est ainsi que les micros Fender ont été bobinés avant 1965, jusqu'à ce que les opérations deviennent semi-manuelles grâce à l'utilisation d'une machine à bobiner, l'employé guidant au jugé le fil de cuivre pendant que la carcasse du micro  tourne sur la machine. A partir de 1965, Fender utilisera une machine qui  automatisera totalement le processus de fabrication, se traduisant par des spires bien régulières et parallèles. Cela aura un impact sur le caractère des micros. Une grande partie du son des anciens micros Fender viendrait en fait du bobinage manuel, notamment la tension très variable des différents enroulements, qui avait en réalité un impact sur le timbre (tone).Un sacré boulot : le bobinage d'un micro Fender nécessitant environ 7900 spires ! Sachez que le fil n'était pas très tendu quand les employés de Fender bobinaient les micros, avant 1965. C'est une des raisons de leur qualité.

L'isolation du fil de cuivre

Le fil cuivre de la bobine est  recouvert d'un isolant, destiné à éviter qu'un court-circuit ne se produise dans les spires du micro. Il y a différents isolants utilisés : le heavy  formvar, le poly et le plain enamel. Jusqu'en mars 1964, Fender utilisait du fil isolé au heavy formvar. Par la suite, la compagnie qui est alors rachetée par CBS utilisera du fil plain enamel. Ce changement interviendra à peu près en même temps que l'usage d'une autre fibre vulcanisée de couleur grise pour la flatwork.

Ci dessous une photo d'un fil en plain emanel, reconnaissable par sa couleur marron cuivré :

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Une photo de fil isolé en heavy formwar :

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Une photo de fil en poly. La couleur est diffiérente :

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Le diamètre du fil

Fender utilisait habituellement un fil de cuivre d'un diamètre nominal de 0.0635 mm, ou plutôt 0,063341mm pour être précis, autrement dit du AWG 42. Ce diamètre de fil était apparemment utilisé pour tous ses micros, excepté le micro manche de la Telecaster, pour lequel Fender utilisait du AWG 43. Pour info, AWG signifie American Wire Gauge.

L'usage de paraffine ou wax potting

Fender plonge les micros qui viennent d'être fabriqués dans de la paraffine liquide, car chauffée au bain marie. Bien souvent, ce bain intègre 20% de cire d'abeille, dans le but de fluidifier davantage la mixture. Cette opération, appelée wax potting en anglais, permet, en fait, de minimiser les vibrations des spires, une fois que le micro est en situation de jeu, car la paraffine vient se loger dans l'enroulement, s'immisçant dans les spires, formant une sorte de scellement.  Le but ? Eliminer autant que possible la microphonie. 

Cela dit, la procédure est très précise : la température du bain ne doit pas excéder 65°/66° ; elle ne doit pas être inférieur à 64°. Les micros sont plongés une vingtaine de minutes et il faut agiter de temps en temps ses câbles qui, eux, sont maintenus partiellement  à l'extérieur de la mixture.  Le micro est extrait du bain, quand plus aucune bulle d'air ne se dégage de son  enroulement. Voilà pourquoi les câbles des micros présentent toujours des traces de paraffine.

attention.jpgAttention ! La paraffine est hautement inflammable. Il faut prendre beaucoup de précautions lorsqu'on engage cette opération. Ne jamais faire chauffer la paraffine dans un micro-onde, ne le faire qu'au bain marie. Enfin, si la température de la mixture est excessive, vous pouvez détruire ou ruiner votre micro !

Pourquoi les micros d'avant 1964 sonnent-ils mieux ?

Si les micros d'avant 1964 sonnent mieux, ce n'est pas pour une raison, mais plusieurs. Et aucune d'entre elles ne peut, seule, avoir d'influence significative sur le timbre de ces micros. Passons les en revue :

Démagnétisation des plots aimantés : avant 1965, Fender utilisait des plots de plus large diamètre, qui étaient sand cast et les magnets étaient en alnico. De plus, moins les magnets sont puissants, plus les cordes peuvent vibrer. Ces principes étant posés, rappelons que les micros d'avant 1965 ont désormais plus de 40 ans. Si tant de guitaristes aiment le son délivré par ces vieux micros, il est donc probable que leur démagnétisation a atteint un niveau parfait pour la restitution du son d'une guitare. Ce qui nous conduit à dire que l'on pourrait obtenir tel résultat, en démagnétisant les plots d'un micro récent. Reste à savoir dans quelle limite.

Le bobinage manuel :un micro bobiné à la main sonne mieux que le même bobiné selon un processus totalement automatisé. Or, il semble que la tension des spires des micros Fender d'avant 65 était optimale pour la restitution du son de la guitare.

L'isolation du fil de cuivre : Fender utilisait jusqu'en 1964 du fil de cuivre isolé au heavy formvar, comme nous le disions plus haut. Cela a probablement eu une influence sur le timbre de ses micros. D'ailleurs, aujourd'hui, Fender réutilise le formvar et sa production est généralement considérée comme excellente. Y aurait-il un lien ? Pourquoi pas ?

Sachez ici que le formvar d'aujourd'hui n'est plus tout à fait celui de l'époque. Or, la nouvelle production de formvar est légèrement différente. Voici une explication détaillée. Elle a été postée sur le forum de Seymour Duncan par Glassman. Je l'ai laissée en anglais, pour conserver son intégrité :

I’m not a pickup winder but I have 20+ years experience in the magnet wire industry in quality and applications engineering. There are actually a lot more variables here than meet the eye. Formvar has changed a LOT over the last 4 decades. Poly Vinyl formal Varnish (Formvar) used to be a mixture of several different molecular weight vinyls and phenolic up through the 1970’s. Formvar was very sensitive to moisture so formulas were modified with a polyurethane additive to make the varnish more stable…most Formvar enamels today are this modified version. In the early 1990’s, Monsanto stopped making the Formvar resin and sold their formulas and rights to the Chisso company. Though marketed as an identical material, the formulation was different enough that enamel formulas had to be reformulated from scratch. Properties on the new Formvars are slightly different from the previous versions

Les potentiomètres : dans les années 60, les potentiomètres avaient une tolérance bien plus grande que celle offerte par les productions actuelles. Cela peut considérablement modifier le son. J'an ai fait l'expérience sur des wah. La différence est terrible...

La guitare elle-même : c'est le facteur le plus évident, et celui qu'on citera en dernier. Car, une guitare bien construite, faite avec des bois de qualité, séchés le temps qu'il faut, va constituer une bien meilleure caisse de résonance aux micros qu'une pelle faite avec du bois vert, qui plus est de piètre qualité sonore. Normal, non ? Et si vous ajoutez à cela la qualité de fabrication de l'instrument, le vieillissement d'une  guitare produite avec d'excellents bois, vous obtenez le meilleur de ce que l'on peut offrir à de bons micros pour sonner.

La fragilité des micros des années 50

Il semblerait (mais je n'en ai pas la preuve, je l'avoue) que les micros bobinés par Fender durant les années 50 sont beaucoup plus fragiles que d'autres micros bobinés par d'autres compagnies à la même époque. La raison ? Le fil de cuivre était enroulé directement autour des plots aimantés, sans aucun isolant pour leur éviter d'entrer en contact avec les spires. Cela poserait beaucoup de problèmes, en raison de réactions chimiques inattendues. Car, avec le temps, la corrosion qui apparaît sur les plots attaque l'isolant du fil de cuivre, provoquant au final la mort du micro.

Une autre cause de destruction de ces micros est évoquée. Elle surviendrait quand on cherche à ajuster la hauteur du plot sous la corde Sol (G), alors qu'il n'est pas ajustable. La surface des plots de l'époque était sand cast (rappelez-vous !), dont légèrement abrasive. Le plot peut donc rompre un enroulement. Et, là aussi, le micro rend l'âme.

Sachez que les micros plus récents de chez Fender ne présentent aucun de ces problèmes. Car la compagnie pulvérise une laque sur les plots aimantés dès qu'ils sont insérés entre leurs flatworks.

Pour ceux qui veulent plus

Pour conclure

Sachez, enfin, qu'il est possible de fabriquer ses propres micros avec exactement les mêmes pièces et fils que ceux utilisés par Seymour Duncan ou Fender. J'ai passé beaucoup de temps à trouver quels étaient les principaux fournisseurs (tous américains). Notamment pour les fils de bobinage en formvar resin (comme avant). le bobinage est ce qui coûte le plus cher dans la fabrication d'un micro. Pour le moment, je n'ai acheté qu'une grosse bobine plain enamel 42 AWG de marque MWS (a priori introuvable en Europe). MWS se targue de fournir tous les principaux fabricants de pickups US. Photo des micros que je m'apprête à assembler :

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Les micros des visiteurs

Le micro d'Etiennao (voir les commentaires à son sujet ci-dessous) :

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